Ci-joint le texte de l'introduction d'une discussion débat organisée par la section Drôme de la Gauche révolutionnaire.
Après le capitalisme, instaurer une véritable démocratie socialiste
(Ou quelle société pour en finir avec l’exploitation et permettre le partage des richesses ?)
Nous avons choisi ce sujet pour cette nouvelle discussion débat, car il suit logiquement notre dernière discussion qui portait sur les moyens de résister au capitalisme. Nous avions mis en avant le moteur que pouvait représenter la grève générale, en résumé, le blocage de l’économie comme meilleur moyen de résister et de préparer la transition vers une autre société.
Après la résistance et le renversement du capitalisme, il nous faut réfléchir à une alternative, et nous mettons au débat le socialisme. Le sujet est vaste, c’est pour cela que je me suis cantonné aux grandes lignes de la société future à construire.Cette conception de société ne tombe pas de nulle part, c’est le fruit des luttes passées, des expériences démocratiques socialistes et autogestionnaires, du travail scientifique de Marx et de ses successeurs, et si nous en renouvelons le contenu, c’est que nous considérons ce modèle socialiste comme le plus sûr pour assurer la transition après le renversement du capitalisme et ainsi assurer la fin de l’exploitation, le partage des richesses et la gestion collective et démocratique de la société.
Cette discussion nous permet aussi de répondre aux nombreuses objections sur le fait que nous sommes toujours « contre » ou « anti ». Nous sommes effectivement contre cette société capitaliste, et nous combattons ses dérives et ses injustices, mais nous sommes aussi pour la dépasser et construire le socialisme. Nous ne prétendons pas posséder le modèle idéal qu’il faudrait suivre à la lettre comme des moutons. Cependant, il est nécessaire d’avoir un projet politique pour l’avenir afin de l’exposer et d’en débattre avec les travailleurs, d’autant que ce débat et cette discussion de l’avenir sont un moteur pour les luttes actuelles et créée le lien avec l’injustice du système capitaliste. Bien qu’en période calme, le socialisme soit essentiellement « propulsé » par certains partis politiques qui n’ont pas abandonné la science marxiste pour l’opportunisme, en période révolutionnaire, il devient le projet de tous, et il sera construit par les femmes et les hommes qui mèneront la révolution et bâtiront sur les ruines du capitalisme cette société nouvelle dont ils seront les protagonistes conscients.
Aujourd’hui, l’heure n’est pas encore à la révolution, bien que la lutte des travailleurs et la conscience de classe soit dans une phase ascendante, le secteur automobile étant le fer de lance de la contestation. Il nous faut exposer et débattre de ce sujet, car l’importance de la crise du capitalisme et de son impossibilité de résolution (excepté peut-être par une nouvelle guerre), va imposer d’un côté un retour à de terribles conditions d’exploitation des travailleurs, mais aussi des luttes gigantesques qui vont ébranler tout le système en place. La crise du capitalisme, les guerres, les famines, la crise écologique, la casse sociale généralisée, démontrent dans les faits que le capitalisme doit-être dépassé si l’humanité veut avoir une chance de survivre. Cette possibilité de dépassement réside dans une alternative qui n’a rien d’utopique : le socialisme, tel que défini scientifiquement pour la première fois par Marx et Engels au milieu du 19ème siècle.
Ce qui fait aujourd’hui la force des capitalistes, et qui leur permet de dominer la société en tant que classe sociale, de s’accaparer les richesses produites et d'exploiter les travailleurs, c’est la propriété privée des moyens de production. En effet, la base économique d’une société détermine les rapports sociaux entre les individus, les structures politiques, juridiques et idéologiques. Lors de la transition du capitalisme au socialisme, l’une des principales mesures sera la suppression de la propriété privée des grands moyens de production, d’échanges, de transports, bancaires et financiers... qui sont actuellement entre les mains des capitalistes.
Citation : « ce qui caractérise le communisme, ce n’est pas l’abolition de la propriété en général, mais l’abolition de la propriété bourgeoise. Or, la propriété privée d’aujourd’hui, la propriété bourgeoise, est la dernière et la plus parfaite expression du mode de production et d’appropriation basé sur des antagonismes de classes, sur l’exploitation des uns par les autres. En ce sens, les communistes peuvent résumer leur théorie dans cette formule unique : abolition de la propriété privée. » Marx Engels, manifeste.
Cette mesure ne pourra être appliquée qu’après une révolution, elle sera la première qui abolira la domination d’une classe en lui ôtant le pouvoir économique et en le donnant à l’ensemble des travailleurs. Elle entraînera toutes les autres mesures.
Maintenant, il nous faut expliquer le fonctionnement de cette nouvelle société ; économie, démocratie, planification...
Les grandes lignes d’une société démocratique socialiste
Dans cette société, la domination d’une classe sociale, la bourgeoisie, est abolie par la domination du prolétariat numériquement majoritaire. Avec la suppression de la propriété privée des grands moyens de production et leur gestion collective, il n’y a plus possibilité pour une classe d’en asservir une autre. C’est la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme. Tous les êtres humains entrent dans le processus de production en fonction de leurs capacités et reçoivent en échange de quoi vivre dignement. L’économie socialiste n’est pas, contrairement au capitalisme, basée sur la recherche du profit, mais sur la satisfaction des besoins de tous. Cette économie est gérée démocratiquement par l’ensemble des travailleurs et de la population afin de produire ce qui est nécessaire, en quantité voulue, grâce à une planification démocratique de la production.
Cette société marquera la fin de l’exploitation, de la misère, des guerres (qui ne sont menées que pour les intérêts des classes dominantes dans le contrôle des territoires et des ressources), de la destruction écologique...etc, pour voir naître l’égalité, la justice, la solidarité et le partage. L’humanité sort ainsi de l’ère de la barbarie pour écrire son histoire de son action révolutionnaire consciente et connaître un développement exponentiel inimaginable à l’heure actuelle, puisque l’économie sera dirigée vers la satisfaction des besoins de tous, mais aussi le bien-être général des hommes.
La recherche scientifique, la technologie et la production seront orientées, non pour la recherche des profits, mais pour la satisfaction des besoins humains.
Comment fonctionnera cette société socialiste ? Démocratie, production et planification
La démocratie socialiste est en totale opposition au fonctionnement du parlementarisme bourgeois. Ce qui caractérise le capitalisme, c’est l’absence de démocratie dans l’économie car la production appartient et est décidée par les propriétaires des moyens de production : les capitalistes.
Dans ce système, les institutions ne visent qu’à protéger l’économie capitaliste et la propriété privée, le rôle du parlementarisme est de concentrer dans ces institutions, au travers des élections, les marionnettes qui gèreront la société en fonction des intérêts bourgeois.
Pour comprendre l’importance de l’économie dans la société, il est nécessaire d’utiliser les analyses de Marx sur cette question. Marx a démontré que la structure qui est à la base de toute société est matérielle. En effet, les premiers hommes préhistoriques durent coopérer pour produire de quoi survivre. Lorsque la productivité s'accrut grâce à la découverte de l’agriculture et de l’élevage il y a environ 10000 ans, le mode de production évolua, et ainsi furent produits des surplus qui furent appropriés par les premières classes sociales dominantes, se coupant de la production directe. De là, la naissance des classes sociales et la superstructure politique et idéologique qui venait justifier cette appropriation d’une production collective par un petit nombre d’individus.
Nous le voyons, l’infrastructure de toute société est matérielle et économique, et c’est le mode de production et d’accaparement du surplus produit socialement dans la société par une classe dominante qui détermine la superstructure politique et idéologique. Sous le capitalisme, le mode de production capitaliste repose sur la constante évolution des outils de productions qui appartiennent à des propriétaires privés et sur l’exploitation des travailleurs. Ce mode de production et cette classe sociale dominante, la bourgeoisie, se sont dotés des superstructures nécessaires au maintien et à la perpétuation de ce mode de production, d’où des institutions et un Etat adaptés à cet effet.
C’est pour cette raison qu’il n’y a pas de démocratie dans les entreprises, et plus généralement, dans l’économie. Sous le socialisme, la production et la gestion de la société étant réalisées collectivement, tous les aspects de cette société seront décidés et gérés démocratiquement par les travailleurs eux-mêmes et la population.
Comment fonctionnera cette démocratie dans une société socialiste ?
Une réelle démocratie ne peut se contenter d’une élection à intervalles réguliers comme sous le capitalisme sans une implication de la majorité des membres de la société, car la gestion d’une société socialiste est l’affaire de tous. Quelle que soit l’échelle à laquelle on s’investit, il faut que chacun donne de son temps pour décider en commun des affaires publiques. Et ce temps de discussion nécessaire à la démocratie sera libéré sous le socialisme car la productivité du travail augmentera, le partage du travail entre tous et le développement technologique viseront à réduire le travail humain et la réorientation de la production en fonction des besoins réels de la population auront pour effet de baisser drastiquement le temps de travail.
Une démocratie socialiste part de bas en haut, avec des représentants élus et révocables. Tous les secteurs de la société seront gérés démocratiquement, des comités existeront à chaque niveau, sur les lieux de travail, dans les quartiers, dans les écoles, au service de l’eau ou voirie de la ville... pour contribuer à l’organisation de la production et de la société. Le fonctionnement de ces comités sera parfaitement démocratique, chacun pourra s’y investir et y être élu. Dans chacun de ces comités seront élus des représentants qui iront représenter le comité dans des échelons supérieurs, partant de la base vers le sommet, local, régional puis national. Par exemple, la gestion d’une ville sera réalisée par des représentants de quartiers, d'entreprises, de comités assainissement, voirie, urbanisme, culture... Dans une ville ou un village, chaque quartier aura son comité qui débattra et décidera de la gestion des affaires du quartier. Ce comité élira un ou deux représentants qui défendront les besoins du quartier dans le comité central de la ville. Ensuite, dans ce comité de ville, les élus des comités de quartier prendront des responsabilités après élections dans tous les domaines d’action de la ville, tel que la voirie, les espaces verts, l’assainissement, la culture, l’éducation, l’urbanisme... Il est évident que ces comités de gestion de la ville seront composés de membres des comités de quartier, mais aussi des représentants du personnel de chaque branche ainsi que de toute personne qui souhaitera s’y investir en s’y faisant élire. Des représentants du comité central de la ville seront à leur tour élus pour représenter les besoins la ville au niveau régional, etc... Pour une entreprise, l’ensemble des salariés désignera un comité exécutif qui gèrera la production. Ce comité aura lui aussi des élus qui se rendront au niveau national dans le secteur d’activité afin de planifier la production en fonction des besoins réels de la société.
Les représentants élus, quel que soit leur délégation (local, régional, national...), devront rendre des comptes auprès de la base qui les a élus et seront révocables à tout moment s’ils sont incompétents ou ne suivent pas les décisions prises en comité. Leurs salaires ne devront pas dépasser celui du salaire moyen pour que les représentants ne soient pas coupés de la réalité des conditions de vie de la majorité. De plus, ces élus ne pourront pas cumuler les mandats et ces derniers seront limités en nombre : ex : 2 mandats. Après, le représentant devra retourner à la vie active.
Ce fonctionnement diffère totalement du parlementarisme, car il ne peut se développer de professionnalisation en politique, et tous les membres de la société devront s’investir dans la vie publique selon les intérêts de chacun.
Sous le capitalisme, le salaire des parlementaires est démesuré, soit disant pour justifier leur indépendance face aux pressions qu’ils subissent des lobbys et autres organisations patronales... Ce salaire incite d’une part à la professionnalisation (et donc l’acceptation du système car pour réussir à progresser dans les institutions il faut se plier aux règles des partis institutionnels qui le défendent), d’autre part à adopter un mode de vie aisé, coupé de la réalité que vivent les travailleurs et les jeunes. C’est pour cela qu’ils défendent les institutions qui leur assurent tous ces privilèges, ainsi que le capitalisme qui assure leur position sociale acquise politiquement.
Puisque nous défendons, en tant que parti révolutionnaire, ces principes de démocratie pour la société à venir, nous les appliquons déjà au sein de notre parti. Toutes les décisions sont prises démocratiquement, tous les membres peuvent exposer leurs positions, et ainsi, nous fonctionnons, certes à notre échelle, déjà en démocratie. Et nous essayons d’exposer à chaque fois que c’est possible ce fonctionnement là où nous intervenons, dans les mouvements plus larges tel que les Indignés, ou les luttes des travailleurs... (Nous savons par expérience qu’une bureaucratie peut s’implanter avec le temps et supprimer la démocratie, il n’y a qu’à voir le fonctionnement des directions de certains syndicats et de la plupart des partis politiques. Ce phénomène n’est pas une fatalité si tout le monde s’implique dans le fonctionnement des organisations pour empêcher de telles dérives. La bureaucratie devient rapidement un frein et se retourne contre les membres de la base (par exemple certaines directions syndicales qui, refusant la confrontation directe avec un gouvernement, ou une lutte trop importante dont ils pourraient perdre le contrôle, freinent en général la révolte).
La démocratie socialiste est donc la représentation réelle des besoins du peuple, par le peuple, pour le peuple. Ces besoins déterminent la production matérielle, intellectuelle, culturelle, sociale... de la société. Mais là où la démocratie doit réellement représenter les besoins de la population, c’est bien dans l’économie, car c’est par la production et la répartition de cette production entre tous que réside le vrai enjeu du fonctionnement de la société future.
La planification démocratique de la production
Ce qui caractérise le capitalisme, c’est l’anarchie de la production. La propriété privée des moyens de production met en concurrence les entreprises qui se livrent une guerre économique pour dominer le marché et ainsi s’assurer le maximum de profits, et si possible, affaiblir ou éliminer la concurrence. Cependant, pour mener à bien cette guerre, une planification développée et minutieuse est absolument indispensable au sein de chaque entreprise ou multinationale. Cette planification interne à chaque entreprise privée permet de produire au plus vite et à moindre coût, assurer l’approvisionnement des matières premières en temps voulu, planifier le renouvellement du matériel et assurer le strict minimum d’ouvriers nécessaires à la production. Ces facteurs permettent d’abaisser les coûts de production et ainsi proposer sur le marché les marchandises produites au plus bas prix.
Car, en dehors de l’entreprise, sur le marché, c’est la jungle, il n’existe aucune planification, chaque entreprise produisant sans connaître les débouchés pour ses marchandises ni si ce sont les siennes ou celles de la concurrence qui seront achetées par les consommateurs. Cette production n’étant pas réalisée en fonction des besoins réels de la population, mais pour assurer un maximum de profits aux détenteurs de capital (aux actionnaires) de chaque entreprise, il est vital pour chacune d’assurer le plus bas coût de production afin de rester compétitif et ainsi gagner des parts de marché pour chercher à dominer le secteur d’activité.
Cependant, cette accumulation de production sans connaître les débouchés réels sur le marché provoque à intervalles réguliers des crises de surproduction menaçant le système dans son ensemble, détruisant des montagnes de capitaux, conduisant à la faillite des entreprises les plus faibles et l’accroissement des monopoles (multinationales), et jetant dans la misère des millions de travailleurs à cause du chômage entraîné par la baisse d’activité.
Sous le socialisme, une telle aberration ne pourrait pas se produire. L’économie sera entièrement planifiée de la production à la distribution en fonction des besoins réels de la population.
Planifier la production nécessite avant tout de pouvoir estimer les besoins réels de la population. Et cette estimation ne peut pas être déterminée arbitrairement par un groupe de personnes coupé du reste de la population, comme ce fut le cas en URSS où seule la bureaucratie stalinienne décidait de ce dont les travailleurs avaient besoin (d’où l’effondrement de cette planification dans les années 1980).
Citation : « La planification a besoin de démocratie comme le corps humain a besoin d’oxygène. »Trotsky
Seuls les travailleurs, producteurs et consommateurs pourront estimer ensemble ce qu’il est nécessaire de produire, en quelle quantité, et aussi assurer la qualité de la production. Ce recensement sera assuré par des comités de planification et de distribution locaux et un comité national collectera et déterminera, en fonction des demandes de la population, la production. Ces comités seront démocratiques, composés de travailleurs, de producteurs et de consommateurs. Une fois les besoins recensés et centralisés, la production peut être réalisée selon un plan déterminé, décidé et géré démocratiquement. Avec l’informatique et les moyens de communication modernes, cette gestion de l’estimation des besoins et de la planification sera simplifiée, mais elle ne pourra se substituer à la gestion par les travailleurs. La production sera réalisée au plus près du lieu de consommation en fonction des possibilités de production, afin de réduire au maximum l’impact sur l’environnement.
Par exemple, la plupart des besoins alimentaires peuvent-être produits localement, ce qui n’est pas le cas d’une voiture qui sera assemblée dans une usine au niveau national.
Les producteurs et le travail dans la société socialiste
Le travail a joué un rôle fondamental dans l’évolution de l’homme. C’est grâce au travail et aux interactions qu’il a engendré que l’homme a quitté l’animalité. Le travail est la base de toute société, de la préhistoire à aujourd’hui, il a engendré l’évolution humaine. Cependant, dès que ce travail a permis de produire de quoi entretenir plus de personnes que n’en demandait la production directe, une classe parasitaire s’est appropriée ce surplus pour sortir de la production et dominer la société. Le capitalisme est la forme actuelle de vol social de la surproduction et l’exploitation des travailleurs en est la conséquence.
Sans travail et sans organisation sociale de la production, aucune société ne peut exister. Le travail perdurera dans la société future, bien que sa forme soit profondément différente de celle d’aujourd’hui. Sous le socialisme, tout le monde entrera dans le processus de production, et tout le monde recevra en échange de quoi vivre dignement. Ce qui caractérisera le travail, c’est que chacun sera libre de choisir dans quelle branche de production il voudra s’investir, qu’il pourra en avoir plusieurs, et qu’il sera libre de les quitter à tout moment. Le travailleur, bien plus qu’un simple prolongement de la machine, à qui on ne demande qu’une activité simple et répétitive, devra comprendre tout le processus de fabrication afin de dominer la production et pouvoir prendre chacun des postes disponibles. Ainsi, il pourra comprendre et s’investir dans les décisions prises collectivement pour l’entreprise. Il décidera, s’il le veut, de se présenter au comité exécutif de l’entreprise et participer à la planification de la production à laquelle l’entreprise est rattachée.
Cela implique une connaissance globale des activités pour tous, ainsi qu’un niveau élevé de connaissance et donc d’éducation. Dans une société socialiste, chacun pourra effectuer des études, et y sera même encouragé. Celles-ci seront rémunérées au même titre qu’un travail car elles apporteront à la collectivité un savoir qui permet l’enrichissement global de la société. Enfin, chacun pourra, à tout moment, changer d’activité et se former dans un ou plusieurs autres secteurs. L’évolution et le changement permettront d’enlever au travail ce caractère exploiteur et repoussoir tel que nous le connaissons sous le capitalisme, d’autant que sa durée hebdomadaire sera fortement diminuée.
Le socialisme et la fin de l’exploitation
Le capitalisme est la représentation moderne de l’exploitation. Toutes les richesses produites proviennent du travail salarié, mais cette richesse est accaparée par les capitalistes du fait de la propriété privée des moyens de production. Sans travailleurs, aucune machine ne fonctionnerait, pas de production, pas de services, pas d’énergie... Le capitalisme ne peut fonctionner que par l’exploitation de millions de travailleurs qui font tourner les usines et fonctionner la société contre un salaire sans lequel aucun travailleur ne peut vivre.
Dans une société socialiste, le travail existera toujours. A partir du moment où la totalité de la production n’est plus accaparée par les capitalistes, mais gérée et redistribuée par la collectivité, le fruit du travail revient entièrement aux travailleurs sous diverses formes : salaire, services publics gratuits... Les travailleurs, en tant que membre de la société, seront eux-mêmes les acteurs de la production puisqu’ils décideront, via la planification, de ce qui doit-être produit et comment. Le fait de choisir, de décider de manière démocratique, enlève tout caractère d’exploitation au travail, chacun étant conscient de la nécessité de travailler pour faire fonctionner la société ensemble dans un esprit solidaire. Produire pour récolter le fruit de son travail, voilà ce que le socialisme offrira.
Dans la société actuelle, le capitaliste nous demande de planter et de faire fructifier son pommier au plus vite. En échange de ce travail, il le rétribue par un salaire. En réalité, le salaire n’est que le trognon d’une pomme récoltée, le capitaliste s’étant accaparé la plus grande et la meilleure part du fruit. Toute la pomme sera rendue au travailleur sous le socialisme, car le pommier sera propriété collective de tous les travailleurs. Cependant, la redistribution prendra plusieurs formes.
Le socialisme et le partage des richesses.
Citation : « De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins. »
Cet adage résume les principes d’une société communiste qui sera l’achèvement de la transition socialiste entre le capitalisme et le communisme. Il est certain que du jour au lendemain, tout ne sera pas directement redistribué. Une période de transition sera nécessaire, d’autant qu’une part importante de la redistribution se fera sous forme de services gratuits. On peut considérer que les services publics actuels, bien que volontairement dégradés ces dernières années pour en justifier la privatisation, sont les embryons des services qui seront accessibles gratuitement ou à faible coût sous le socialisme : santé, éducation, transports, loisirs, culture, télécommunications, crèches, maisons de retraite... dans une première phase de la transition. A terme, le salaire lui-même tendra à disparaître puisque tout sera à disposition des producteurs en quantité suffisante, de la nourriture au logement...
L’argent n’est, en soi, qu’un moyen d’échange marchand. Il perd son utilité dans la société socialiste où tout est en libre-service, selon des modalités de partage déterminées démocratiquement par tout le monde.
On peut penser cette vision de la société utopiste, surtout en raisonnant avec notre esprit emprisonné dans l’idéologie capitaliste. Impossible pour cette société de fonctionner, tout serait volé, gaspillé... Mais si tout est libre, le vol perd sa raison d’être, puisque chacun a accès à ce dont il a besoin. Quant au gaspillage, il sera bien inférieur à celui orchestré sous le capitalisme puisque la production sera orientée par les besoins et non pour des profits. Enfin, la consommation émanant d’êtres humains ayant décidé eux-mêmes, via la planification démocratique, de ce qui devra-être produit, ces consommateurs seront conscients du fonctionnement de cette société et se sentiront responsable du bon fonctionnement de cette dernière pour le bien de tous. Les exploités spectateurs consommateurs d’aujourd’hui, pervertis par l’idéologie bourgeoise de l’accumulation, de la réussite personnelle et de l’individualisme, seront les producteurs décideurs de demain, conscients de leur rôle social dans le fonctionnement de la société socialiste.
La nature humaine, obstacle au socialisme ?
Citation : « Ce n’est pas la conscience qui détermine l’être, mais l’être social qui détermine la conscience ». Marx, Engels, l’Idéologie allemande.
Cette citation résume la pensée marxiste sur la nature de l’homme. Les rapports que les êtres humains entretiennent entre eux, la façon de produire et d’échanger, mais aussi les idées qu’ils ont, sont déterminés par la société et les relations sociales qui existent entre les individus. Dans une société capitaliste, le mode de vie est plus facilement tourné vers l’égoïsme, la réussite et la possession, quelles que soient les méthodes pour y arriver (vol, usurpation...). La nature humaine porte souvent les traits de l’idéologie de la classe dominante et de la société. Cependant, cette nature est changeante en fonction des conditions qui peuvent rapidement faire évoluer les consciences, et un exemple est la lutte des travailleurs lorsqu’ils revendiquent des avancées sociales ou refusent un plan de licenciement. Dans la société socialiste, la nature humaine sera différente. Cette société étant le fruit de la participation de tous à sa gestion ainsi que du partage, les consciences évolueront vers le partage et l’engagement.
Nous venons de tracer les grandes lignes de ce à quoi pourrait ressembler la société future lorsque nous en aurons fini avec le capitalisme. Bien entendu, il n’y a pas de schéma préétabli, nul ne sait à l’avance comment se produira la révolution, ni son déroulement, mais il est indispensable de penser au futur si nous ne voulons pas voir les forces réactionnaires l’emporter sans cesse à chaque nouvelle révolution.
Il faut préciser également que cette société future, pour réussir, ne peut se cantonner aux frontières nationales. Une révolution démarre dans un pays, mais elle doit rapidement se propager si on ne veut pas voir cette dernière échouer. Il est certain qu’une révolution victorieuse dans un pays donnera aux travailleurs du monde entier la volonté et les armes pour mener à leur tour la révolution dans leur propre pays.
Le modèle socialiste que nous proposons n’est pas un idéal utopique, mais les grandes lignes de l’objectif à atteindre. Il ne se fera pas sans la majorité exploitée de la société qui seule peut renverser le capitalisme pour construire sa société pour ses besoins réels.
Nous soumettons cette proposition de société au débat, que la discussion fasse fructifier les possibilités.
Mathieu Sauvan
Février 2013