Qu’ils ne croient pas avoir gagné...
Contre la politique de Sarkozy et les capitalistes : Le combat continue !
Mouvement contre la «réforme» des retraites : le début d'une nouvelle période de lutte !
L'automne 2010 a démarré sur les chapeaux de roues sur le terrain de la lutte des classes. 8 journées de grèves et de manifestations massivement suivies et qui ont rassemblé des millions de personnes dans les rues. 2/3 des français se prononçaient contre le projet de réforme du gouvernement et soutenaient la mobilisation, même si souvent beaucoup ne pouvaient faire grève. Dans les cortèges, se retrouvaient les salariés du public, du privé, des lycéens, des étudiants, des retraités, des précaires et privés d'emploi avec une détermination et une combativité grandissante...
Supplément spécial à L'Egalité n°145 (septembre-octobre 2010)
Au delà de la défense de notre système de retraites, ce qui s'est exprimé dans ces manifestations, à travers les pancartes, banderoles et autres slogans, c'est bien le ras le bol de Sarkozy et de toute sa politique. Une politique au service des riches et des patrons, qui donne toujours plus à ceux qui ont tout et ne laisse rien à la majorité de la population. En trame de fond de ce mouvement social, une revendication centrale : «ce n'est pas à nous de payer la crise!»Une volonté de bloquer l'économie
Blocages des dépots de carburants, des axes routiers, de la circulation de camions, des voies de chemins de fer, des ports,… Toutes les raffineries du pays à l'arrêt. Quelque chose se passe dans la conscience de beaucoup de travailleurs et de jeunes : pour faire reculer le gouvernement, il faut taper où cela fait mal, dans le portefeuille. «Bloquer l'économie » est l'idée centrale qui est revenue dans toutes les discussions, les assemblées générales de secteurs, sur les piquets de grèves, dans la rue... De nombreuses actions ont été menées dans ce sens avec une volonté de s'attaquer directement à la bourgeoisie, au patronat en leur faisant perdre de l'argent.La grève reconductible des travailleurs des raffineries illustre bien cela vu le poids économique du pétrole.
Tout ceci est juste politiquement : ce n'est qu'en construisant un rapport de force conséquent et en paralysant l'économie du pays que l'on peut mettre à terre un gouvernement. Pour les marxistes, il s'agit là aussi de démontrer que c'est la classe ouvrière qui fait tourner l'économie d'un pays et que c'est elle seule qui peut renverser le système capitaliste dans lequel nous vivons.
Mais ces blocages n'ont pas été le résultat d'arrêts de travail généralisés, de grèves, dans tous les secteurs de la production. Ils ont été le fruit de l'action de grévistes et de militants syndicalistes et politiques combatifs. Ce constat fait partie des difficultés auxquelles s'est confronté ce mouvement.
Ces militants ont mis beaucoup d'énergie pour tenir ces blocages jour et nuit, délogés par la police et les CRS, et reprenant les lieux aussitôt pour montrer leur détermination. Dans différents secteurs, (cheminots, postiers, travailleurs de l'énergie, routiers, éboueurs...) la grève a été reconduite mais souvent de façon minoritaire. Une grève générale commence toujours par une minorité de grévistes. Mais elle se renforce et s'étend parce que ces derniers prennent le temps de mobiliser leurs collègues, organisent des assemblées générales, discutent des revendications, et gagnent peu à peu de nouveaux travailleurs et de nouveaux secteurs à la grève. C'est en partie cela qui nous a manqué lors des semaines d'octobre. Tout se faisant dans l'action de blocage sans parfois prendre suffisamment le temps nécessaire pour élargir la grève.
Le rôle de l'intersyndicale
Les directions syndicales n'ont jamais clairement voulu organiser la riposte nécessaire pour faire reculer le gouvernement. Pour les principales confédérations, comme la CGT et la CFDT, il ne s'agissait d'ailleurs pas d'exiger le retrait de la loi mais bien l'ouverture de nouvelles négociations sans avancer sur l'élaboration de revendications claires sur le nombre d'annuités de cotisations ou la prise en compte des travaux pénibles. C'est donc bien parce qu'à la base, dans les entreprises et les sections locales, il y avait une telle colère contre ce projet que les directions ont appelé à plusieurs journées de grèves. Mais jamais elles n'ont pris leur responsabilités dans ce mouvement.
Le 19 octobre, alors qu'il y avait dans les rues encore plus de 3 millions de personnes, que chacun a senti que le moment était venu de renforcer la mobilisation, qu'un sondage annonçait que 55% des français étaient pour une grève générale, seule solution pour imposer le recul du gouvernement, les directions syndicales ont attendu 2 jours pour se réunir à nouveau, laissant ainsi les grévistes dans l'attente et sans perspectives (et la date annoncée était une semaine plus tard !).
En se déclarant pour un durcissement du mouvement mais sans appeler à la grève générale et reconductible, Thibault, le secrétaire général de la CGT, refuse alors de prendre ses responsabilités. En agissant ainsi, sous prétexte de préserver une unité syndicale fragile, les dirigeants syndicaux ne font que le tampon entre la pression montant de la base et le calendrier voulu par le gouvernement pour mettre en place son projet. Ils participent donc de fait à faire passer l'attaque.
C'est par la lutte que nous pourrons vaincre Sarkozy
Une chose est sûre, ce mouvement aura montré que ce n'est qu'en luttant que nous pourrons battre la politique de Sarkozy et des capitalistes. Les partis de la gauche traditionnelle laissent faussement croire que les choses pourraient changer en 2012 (le PS voyant son candidat élu aux présidentielles, et le PC proposant un projet de loi alternatif ou un référendum), mais pour une certaine partie des travailleurs et des jeunes, il est clair que sous le capitalisme, il n'y aura aucune avancée sociale durable. Ce qui témoigne d'une avancée du niveau de conscience politique. Durant ce mouvement, des travailleurs de différents secteurs se sont rencontrés, ont lutté ensemble au quotidien, discuté, organisé des actions... Des assemblées générales interpro se sont réunies. L'important, c'est de maintenir ces organes de lutte et de préparer les suites. Il y aura bien d'autres batailles à mener .. car les attaques ne vont pas s'arrêter là.
Durant sa campagne présidentielle, Sarkozy se disait prêt à en finir avec «l'esprit de mai 68» et affichait sa volonté d'infliger une défaite à la classe ouvrière. Il a échoué, nous sommes aujourd'hui bien loin de ce résultat. Au contraire, même si la loi sur les retraites est promulguée, les travailleurs et les jeunes renouent et reconstruisent leurs outils de lutte. Ce dernier mouvement a été en quelque sorte l'expression de cela par les formes nouvelles qu'il a pu prendre. De chacune de ces luttes, la classe ouvrière fait ses expériences et tire ses bilans... C'est dans ces moments-là que la classe ouvrière prend conscience de sa force et de son poids dans la société. Et notamment alors qu’une petite partie des travailleurs était en grève reconductible, cela a eu un impact puissant sur l’économie, une grève encore plus vaste aurait à coup sur eu un impact encore plus grand et rapide.
Le climat de lutte générale a permis que des salariés se mettent en grève dans leur entreprise sur leur propres revendications concernant des plans de licenciements, des conditions de travail, de salaires... Et ces préoccupations sont clairement comprises comme étant complètement opposées à la politique de Sarkozy et des grands patrons, c’est tout cela qui s’est exprimé à une échelle de masse et qui change la situation. Il y aura certainement d'autres et nombreuses luttes dans les mois à venir. Dès à présent, nous devons nous organiser, syndicalement mais aussi politiquement afin de préparer les prochaines batailles, de définir nos revendications et les moyens d'y accéder.